Inflation à venir : quelles conséquences pour les marchés financiers ?

par Pauline

A l’aube d’une inflation toujours plus grandissante, les marchés financiers sont sous pression.

Pourquoi ?

Une inflation plus élevée est synonyme de perte de pouvoir d’achat pour les ménages et de surenchérissement des coûts pour les entreprises.

Mais les investisseurs recherchent, eux, un rendement plus élevé pour compenser l’effet de l’inflation. Et plus ils s’attendent à ce que l’inflation soit forte, plus ils réclament de dividendes importants pour compenser leur risque.

Cela créée une pression à la baisse sur le cours.

Sommaire

Comment les marchés financiers réagissent à l’inflation ?

Les agents économiques anticipent une possible intervention des banques centrales pour endiguer l’inflation. Ces dernières peuvent décider d’augmenter les taux directeurs pour encadrer le crédit.

Une augmentation du taux directeur serait répercutée sur les taux d’intérêt. L’augmentation du coût de l’emprunt qui en résulterait dissuaderait les agents économiques de consommer et d’investir. D’un autre côté, ces mêmes agents seraient incités à épargner (car des taux d’intérêt plus élevés rémunèrent mieux l’épargne).

Sur les marchés boursiers, le cours des actions est déterminé par l’offre et la demande. Les choix des investisseurs sont influencés par une combinaison de facteurs (sociaux, politiques, économiques, culturels, etc.), dont l’inflation.

Car pour choisir leurs titres, les investisseurs ne se basent pas sur la rentabilité actuelle des entreprises, mais sur leurs profits futurs. Et l’inflation mine la profitabilité des entreprises en surenchérissant leurs coûts opérationnels et en réduisant la consommation.

Les investisseurs anticipent donc une baisse de la rentabilité future des entreprises. Ils peuvent alors préférer vendre certaines actions de leur portefeuille pour acquérir d’autres produits financiers plus rémunérateurs, ou plus résistants dans un contexte de marché baissier (des valeurs refuges telles que l’or, par exemple). Comme dans une prophétie auto-réalisatrice, ce faisant, ils poussent effectivement les cours des actions à la baisse.

Les actions qui sont prisées habituellement pour leurs dividendes élevés sont particulièrement vulnérables à cette baisse des cours. Car en période d’inflation, ces dividendes sont dévalorisés, en raison de la perte de valeur de la devise. Dans certains cas, ils peuvent même devenir inférieurs au taux de l’inflation, ce qui signifie que l’investisseur a perdu de l’argent.

Les entreprises qui connaissent une forte croissance risquent aussi d’être plus affectées. En effet, elles sont plus susceptibles d’avoir de forts besoins de trésorerie, parce qu’elles doivent engager en avance des dépenses pour financer leur cycle de production.

Comme leurs clients ne les payent que plus tard (lorsque le produit ou le service est mis sur le marché), elles subissent des décalages de trésorerie (en clair, elles doivent emprunter pour couvrir un découvert structurel). Pour cette raison, elles sont plus sensibles à une hausse des taux d’intérêt (leurs agios vont augmenter). Les investisseurs, qui le savent, anticipent qu’elles vont connaître une baisse plus marquée de leur rentabilité.

Ainsi, le durcissement de la politique monétaire favorise globalement une plus grande volatilité des cours des actions.

Le comportement des obligations

L’inflation a également une forte influence sur les produits obligataires. Rappelons que les obligations sont des titres de créance représentatifs d’une dette et que si ces notions vous échappent, vous pouvez consulter des sites spécialisés comme deuz.biz. Elles sont assorties d’un taux d’intérêt, et à l’échéance, l’émetteur de l’emprunt obligataire doit rembourser la valeur nominale de ce prêt au porteur.

Une remontée de l’inflation a 2 effets :

  • Les nouvelles émissions d’obligations intègrent forcément l’inflation, car une obligation qui offrirait un taux d’intérêt inférieur à l’inflation aurait du mal à trouver preneur (Les investisseurs n’en achèteront que s’ils ont la certitude que le rendement de l’obligation se maintiendra malgré l’inflation).
  • Le taux d’intérêt des obligations déjà émises demeure le même. Mais comme les investisseurs les délaissent pour se ruer sur les nouvelles obligations, c’est le prix de ces obligations qui baisse pour s’ajuster à la baisse de la demande.

Leur cours baisse jusqu’à ce que le rendement de ces obligations rattrape celui des obligations nouvellement émises.

Cet effet se maintient si la banque centrale décide de relever ses taux directeurs. En effet, les nouvelles émissions obligataires sont basées sur des taux d’intérêt plus forts. Les investisseurs les trouvent donc plus attractives que les actions et les obligations existantes assorties de taux d’intérêt inférieurs. Plus les taux montent, et plus le prix des obligations baisse.

A l’échelle des Etats

Mais l’inflation et/ou une remontée des taux directeurs a aussi pour conséquence de surenchérir le coût du crédit pour les pays les plus endettés tels que la France. En effet, ces pays se financent via des émissions obligataires, ils émettent des “obligations souveraines”.

Si les taux d’intérêt augmentent, les Etats sont contraints d’emprunter davantage pour assurer le service de la dette. Mais évidemment, jusqu’à un certain seuil… Lorsque les gouvernements sont trop endettés, leur cote de crédit se dégrade. Les investisseurs exigent alors une prime de risque plus importante pour compenser les risques induits par ces endettements supplémentaires.

Dans certains cas, le taux auquel les investisseurs sont prêts à prêter de l’argent aux Etats peut devenir insoutenable pour ce pays. C’est ce qui s’est produit en 2010 avec la Grèce, l’Irlande, l’Espagne et le Portugal.

Les Etats comptent sur l’accroissement de leur PIB pour assurer le service de la dette. Un pays en croissance génère en effet plus de recettes fiscales, lesquelles permettent de payer les intérêts des emprunts et de faire face aux remboursements à l’échéance.

Autrement dit, en cas de croissance forte, un Etat peut mieux surmonter un épisode d’inflation et/ou de hausse des taux directeurs. Mais si l’économie croît moins rapidement que les taux d’intérêt, c’est la catastrophe : le pays peut se retrouver en situation de faillite, et un krach obligataire peut alors survenir.

On peut donc spéculer que les Etats européens, qui se sont endettés de manière inédite pendant la crise sanitaire pour soutenir leur économie, feront tout pour ne pas reproduire 2010 et la crise de financement qui a menacé de faire imploser la zone euro. Ils s’assureront probablement que la hausse des taux d’intérêt ne soit pas supérieure à leur taux de croissance.

Un grand nombre des hausses de prix que l’on constate actuellement s’expliquent par des pénuries apparues dans le cadre de la pandémie. Il faudra du temps pour que les entreprises retrouvent une activité normale. Á terme, certaines de ces pénuries disparaitront, et avec elles, les hausses de prix qu’elles ont engendrées.

La question qui se pose est donc de savoir si le pic d’inflation que nous constatons actuellement est réellement transitoire, et dans quelle mesure les gouvernements surendettés, la population et les entreprises seront en mesurer de le supporter.

Les marchés sont maintenant pendus aux lèvres des patrons de banques centrales. Ils guettent fébrilement la remontée des taux d’intérêt. Pour l’instant, le système tient encore…

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